On peut se le demander... Quel lien, par Zeus, entre Les Bacchantes, Euripide, le théâtre grec de l'Antiquité et le cirque ??? Quel cirque cette histoire ! Ils sont tombés sur la tête, ces théâtreux, pense-t-on peut-être... Quelques premiers éléments de réponse dans cet extrait de notre note d'intention :
"Le cirque donc. Il fallait trouver une idée cohérente, riche et simple pour donner une unité signifiante à notre puzzle annuel. Le cirque permet de maintenir cette cohérence tout en gardant une réelle diversité. L'idée première était de représenter la soumission, dépendance, fascination, perte de la raison... des femmes devenues Bacchantes à leur maître Dionysos par une meute de chiens. L'animalité est omniprésente dans le texte d'Euripide, travailler corporellement autour de ce concept est intéressant théâtralement parlant, l'image de la meute et son maître cohérente.
De fil en aiguille, l'idée du cirque s'est imposée (qu'on peut associer à la foire, à la ménagerie...). On est dans le monde du spectacle, Dionysos, qui se présente dans la pièce comme itinérant, est le dieu du théâtre. La forme du cirque rappelle le forum du théâtre grec. Le cirque est le monde de l'illusion, des costumes, du travestissement, du spectaculaire, du « frisson » de peur... Dionysos est le maître du jeu, metteur en scène, illusionniste... Il dirige le spectacle comme un monsieur Loyal. La présence des « spectateurs » que sont le chœur, mais aussi les messagers ou les Thébains, permet une mise en abyme intéressante avec le public qui vient assister au spectacle.
La présence des animaux du cirque (fauves, chiens, singes savants, vieux éléphants...) permet de développer l'animalité présente dans la pièce. On peut facilement associer chaque personnage à un animal, le texte fait lui-même des associations riches. Le costume des Bacchantes est une peau d'animal. Penthée confond Dionysos avec un taureau. Agavé croit avoir tué un lion en massacrant son fils. Etc. La bête représente aussi symboliquement ce qui n'a pas de raison, et la question se pose : qui sont les fous, les bêtes dans cette histoire ?
De la même manière, beaucoup de scènes peuvent symboliquement être représentées par un numéro circassien : prestidigitation, hypnose, combat de cascadeurs, illusions diverses, jonglerie, clown etc. Ce sont toutes les étapes d'un spectacle de cirque qui sont présentes dans l'adaptation : de la parade au démontage et au départ du cirque, en passant par les différents numéros et l'entracte. Notre pièce sera ainsi une représentation circassienne où s'enchaîneront les différents numéros. L'avantage sera aussi de faciliter les transitions, qui constituent toujours un casse-tête. [...] Ces numéros circassiens sont des lignes conductrices qui peuvent rester plus ou moins discrètes et métaphoriques, on n'est pas obligé de représenter exactement et précisément la piste aux étoiles...
L'intérêt est également de représenter très concrètement et simplement les deux « catégories » des personnages et de souligner la mise en abyme : d'une part les artistes qui sont sur la piste, autour de monsieur Loyal, de l'autre les « petites mains » subalternes qui commentent et exécutent (chœur, messagers, gens de maison...). Ce sont les agents du cirque qui nettoient, veillent au grain, observent, rapportent ce qui se passe à l'extérieur.
Le cirque est également un élément intéressant à explorer pour les CAA : affiches, visuels, rhétorique, ligne esthétique...
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